La tradition d'Allahva, 2

Publié le par Alda

L'agent Jean d'Arme ( matricule 33 ) entra, accompagné d'une blondinette d'une douzaine d'années.

« Mademoiselle le commissaire ? Je vous amène cette jeune fille, qui a trouvé dans la rue un objet que j'ai jugé préférable de vous montrer.

- Il y a les Objets Trouvés pour cela, dit Annie.

- Oui, mais ce... ce truc m'a l'air précieux, en or ou quelque chose comme ça. Alors je me suis dit que...

- Bon, bon, ça va, coupa Annie. Ton nom, petite ?

- Estaline Moulin, monsieur le commissaire... heu, madame le commissaire...

- Mademoiselle la commissaire, s'il te plaît, dit Annie avec froideur.

- Oh pardon, mons... madem... mad... commissaire.

- Bon, bon. Passons. Fais voir l’objet ? »

Estaline tendit à Annie une sorte de statuette à figure vaguement humaine, pourvue d'une tête en forme de poire et dont les jambes étaient rempalcées par une base à peu près circulaire. Les bras de la statuette, qui étaient larges et plats, s'élançaient en avant du corps, et les mains se rejoignaient. La chose était sans doute en or massif, et les yeux semblaient des rubis. Annie, qui avait d'abord considéré l'affaire avec le mépris naturel de celle qui a d’autres chats à fouetter, commença à s'intéresser à cette statuette. ( Estaline, elle, ne pipait mot, attendant de savoir ce que pensait la commissaire Mallier de sa trouvaille. )

Annie proposa à Estaline de s'asseoir dans le fauteuil et la prévint qu'elle allait devoir lui poser quelques questions. Heureuse de voir que l'on faisait quelque cas de sa découverte, Estaline s'exécuta.

« D'abord, commença Annie, où as-tu trouvé cette statue ?

- Au coin de la rue en sortant de chez moi, mademoiselle la commissaire. A mon avis, c’est quelqu’un qui l’a perdu en passant par là.

- Et tu n'as aucune idée de ce que c'est ?
- Aucune !

- Moi, je crois le savoir », dit une voix qui venait des alentours de la porte du bureau.

Annie et Estaline se retournèrent prestement, et aperçurent Maximilien Délit, adossé au mur, et tenant dans ses mains la statuette qu'il examinait avec attention.

Annie jeta un regard surpris à ses propres mains, qui serraient la statue un instant auparavant. Estaline restait admirative devant cet étonnant tour de passe-passe.

Mais Annie ne partageait pas ce sentiment.

« Vous êtes un incorrigible voleur ! Que faites-vous ici ?

- Je suis ici justement parce que je suis un incorrigible voleur, répondit Maximilien sans cesser de regarder la statuette.

- ne faites pas semblant de ne pas comprendre ! Je veux dire ici, dans cette pièce ! Combien de temps êtes-vous resté dans votre cellule ?

- Je dirais cinq bonnes minutes, mais je peux me tromper... 

Annie se tut. Elle ne savait pas quoi répondre. Elle s'adressa finalement à Estaline, qui paraissait ne pas comprendre grand-chose à cette affaire :

« Ma petite Estaline, je te présente Maximilien Délit qui exerce le métier de... heu... de...

- Voleur professionnel, vous pouvez le dire, Annie, continua Maximilien avec un sourire. Et retenu dans ce commissariat pour des raisons que l'on devine. 

- Voilà, c'est cela... et appelez-moi mademoiselle la commissaire comme tout le monde ! Ce n'est pas parce que vous me voyez souvent ces temps-ci que vous pouvez vous permettre de telles familiarités ! Et rendez-moi cette statue !

- Heu, s'il vous plaît, mademoiselle, osa Estaline en levant le doigt comme en classe, je crois que monsieur Délit avait dit qu'il savait peut-être ce que c'était que cette statue, justement.

- Ah, oui, c'est juste... fit Annie ; où avais-je la tête ? Et qu'est-ce que c'est, à votre avis, Maximilien ?

- Appelez-moi Monsieur Délit, d'abord ! ce n'est pas parce que vous me voyez souvent ces temps-ci que vous pouvez vous permettre de telles familiarités ! Enfin, je ne suis pas rancunier, moi, et je vais passer sur ces petits détails. Et puisque vous me le demandez, je vais consentir à vous faire profiter de ma science. A mon avis, ou je me trompe fort , ou nous avons l'honneur d'être en présence d'une authentique statuette jhetupûrienne du XIVième siècle ou antérieure. 

- Une statuette quoi ? répéta Annie, ignorant totalement de quoi il s'agissait.

- Le Jhetupûr, mademoiselle la commissaire, expliqua Maximilien, est un petit pays d'Asie, gouverné à l'heure actuelle par la princesse Amida, troisième du nom. Voulez-vous en savoir plus ?

- Ca alors ! Vous en savez des choses pour un malfaiteur ! s'écria Estaline admirative. Enfin, sauf votre respect, bien sûr...

- C'est depuis qu'il a cambriolé la bibliothèque municipale, fit Annie avec une moue sarcastique. Et tu n'as absolument aucune raison de le respecter, Estaline. 

- C'est vrai que je ne suis pas respectable, confirma Maximilien avec une ironie qui dissimulait mal une pointe de dépit. Mais passons. A-t-on encore besoin de moi ici, ou puis-je me retirer dans mes appartements ?

- Non, restez, dit Annie. De toute façon, si je vous remets en prison, vous en sortirez aussitôt, et puis apparemment, vous savez plus de choses que nous sur le sujet. »

C'est alors qu'on frappa de nouveau à la porte.

Publié dans La tradition d'Allahva

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Z
Trés forts les dialogues !
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B
Ahlala !!! Ces noms ! Ces noms !!!   ^_ ^
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R
Ah ah ah 'adore, tu sais que ça fairait une formidable base de livre pour littérature jeunesse ?
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S
Et bien ce Maximilien quel curieux personnage ^o^Bizsugi la fourmiz
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